Michel Lyan, l’homme de droit aux positions indépendantistes

Michel Lyan, bâtonnier de l'ordre des avocats de Beyrouth de 1999 à 2001, s'est éteint hier à l'âge de 73 ans, des suites d'une longue maladie. Connu tant pour sa notoriété professionnelle que pour son action au niveau national, il laisse l'image d'un homme de droit soucieux de défendre les libertés fondamentales et les valeurs d'indépendance et de souveraineté.

Le disparu aura notamment marqué son mandat de la position courageuse qu'il avait adoptée sous l'ère de la tutelle syrienne, à la suite des événements du 7 août 2001, face à l'arrestation musclée d'étudiants opposés au régime prosyrien. Il avait ainsi décrété une grève de l'ordre des avocats de Beyrouth, en signe de protestation contre cette atteinte aux libertés publiques et aux droits fondamentaux des citoyens.

Membre de la commission de la diffusion de la culture du droit dans le monde arabe, Michel Lyan avait appuyé, après l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, l'instauration d'un tribunal spécial pour le Liban. Prenant ensuite les rênes du forum des avocats du 14 Mars, il avait poursuivi avec sérieux et détermination les travaux de l'instance internationale.

Défenseur des droits de l'homme
Prié par L'Orient-Le Jour d'exprimer l'image qu'il garde du disparu, le secrétaire général du 14 Mars, Farès Souhaid, salue en ce dernier un défenseur des droits de l'homme. « En 2001, après les rafles du 7 août, Michel Lyan a appelé les avocats de Beyrouth à un sit-in devant le palais de justice », se souvient-il, indiquant que le mouvement initié par l'ancien bâtonnier pour réclamer la libération des jeunes étudiants arrêtés avait été rejoint par nombre de militants de diverses formations politiques. « Ce jour-là, alors que des centaines d'hommes en robe noire manifestaient leur opposition aux interpellations, des éléments de la garde présidentielle ont fait irruption, battant violemment des cadres estudiantins avant de les embarquer dans des véhicules de l'armée », se remémore encore M. Souhaid.

Le coordinateur du mouvement du 14 Mars évoque également la position favorable de Michel Lyan à l'égard du Tribunal spécial pour le Liban. « En réponse aux affirmations de (l'actuel ministre de la Justice) Salim Jreissati, selon lesquelles le TSL est illégal, M. Lyan a créé, en 2012, le Forum des avocats du 14 Mars, auquel se sont ralliés plus de 500 avocats en vue de défendre la cause du tribunal international et lui donner un appui juridique », rappelle M. Souhaid.

Il ne manque pas d'évoquer par ailleurs le rôle que l'ancien bâtonnier a rempli face aux problèmes sécuritaires générés par la présence des déplacés syriens dans la Békaa, indiquant que M. Lyan avait présidé le 24 juin 2013 un important séminaire consacré aux points épineux liés à la sécurité dans cette région limitrophe de la Syrie, insistant sur le fait que la sécurité de la Békaa est une responsabilité nationale commune.

Avocat et patriote
Hier, le Forum de Saydet el-Jabal, rassemblement de personnalités chrétiennes souverainistes, a publié un communiqué dans lequel il déplore la perte de l'ancien bâtonnier. Antonio Hachem, bâtonnier de Beyrouth, a salué, pour sa part, en M. Lyan l'avocat et le patriote. « La maladie ne l'a pas empêché un seul jour d'émettre son message, tant au niveau de l'ordre des avocats qu'au plan national », a-t-il souligné dans un communiqué publié sur le site officiel de l'ordre.

De son côté, le président de la Ligue maronite, l'ancien bâtonnier Antoine Klimos, rend hommage à « un défenseur inlassable de la profession, qui prenait toujours des positions convergeant vers l'intérêt de ses confrères ». Dans un entretien avec L'OLJ, M. Klimos relève aussi sa qualité d'homme de droit « attaché à l'éthique et animé d'un esprit sportif dans les batailles ordinales ». « Lorsqu'en 1997 nous avions tous deux brigué le poste de bâtonnier, il s'était comporté non comme un adversaire, mais comme un simple concurrent, pensant que j'agissais autant que lui au service des avocats », raconte M. Klimos, indiquant qu'il a ensuite soutenu M. Lyan lors de sa candidature à la tête de l'ordre en 2001, « pour les valeurs nobles qu'il défendait ».
Rappelant également la prise de position de M. Lyan au lendemain des arrestations du 7 août, le président de la Ligue maronite a salué « l'intransigeance indépendantiste » du disparu.

Quant à Samir Abillamaa, ancien bâtonnier de Beyrouth et ancien président de la Ligue maronite, il insiste, en réponse à une question de L'OLJ, sur la personnalité de Michel Lyan. « Il était un homme tranchant et ferme, en même temps que conciliant et rassembleur », affirme M. Abillamaa, soulignant qu'« il a toujours été fidèle à ses principes politiques, sans jamais retourner sa veste ». « Michel Lyan ne connaissait pas d'ennemis, et ses amis étaient nombreux », résume-t-il en conclusion.

Les funérailles de Michel Lyan auront lieu aujourd'hui à 14 heures en l'église Saint-Élie de Zahlé.

DISPARITION
Claude ASSAF | OLJ11/01/2017